Waiting for more time
Looking for what is gone
Always Hope never stops
Writing about how it feels
A moment will come
A friend will say
Hello and good bye
Robert Frank
Et jamais l’absent
Ne sera moins
Que le présent.
Nous, les enfants, on est du parti de la sauvagerie. On est surtout pour les galops incontrôlés qui font mourir.
On peut aussi traverser la mort sans mourir. On sait très bien la simuler, couchés par terre, les mains croisées sur la poitrine. Pourquoi ces mains toujours croisées. Ou couchés sur le côté, les membres arrachés loin. Les cadavres sous les bombes sont éjectés de la vie dans n’importe qu’elle position. Des positions parfois convulsives, parfois déchiquetées.
il s’agit de rêves sous-jacents comme des nuées poussées par le vent et naviguant sous terre.
Une si grande soif de s’évader loin de ce qu’on fait.
Oui, fouetter un attelage à quinze chevaux.
Jouir de l’entremêlement des rênes.
Du claquement des fouets sur les croupes.
De loin en loin des cris d’appel – appels à la folie.
Des images du fond du lac montent alors à la surface, eau rêves entremêlés.
Il faut aller au combat en ayant l’air de faire des spectacles, en ayant l’air d’être un membre de cette profession, alors qu’aveugle on répète sans fin un exercice toujours nouveau, soliste armé d’un archet de métal torturant un violoncelle.
Toujours revenir, toujours chercher, toujours grincer alors que personne ne sait ce qu’on fait.
Tâcheron dans le noir.
Claude Régy
Sans la folie que serait l’homme
Sinon cet animal bien portant
Cadavre ajourné qui engendre la vie.
Fernando Pessoa
La solitude ne naît point de ce qu’on n’est pas entouré d’êtres, mais bien plus de ce que l’on ne peut leur communiquer les choses qui nous paraissent importantes.
C.G Jung
Il est certain que nous ne sommes pas simplement poussés en avant sur les méandres de notre chemin par nos simples actions mais nous sommes toujours attirés par quelque chose qui semble toujours nous attendre quelque part et qui reste toujours caché.
Hugo Von Hofmannsthal
Nous avons besoin de livres qui agissent sur nous comme un malheur dont souffririons beaucoup, comme la mort de quelqu’un que nous aimerions plus que nous-mêmes ; comme si nous étions proscrits, condamnés à vivre dans des forêts, loin de tous les hommes, comme un suicide – un livre doit être la hache qui brise la mer gelée en nous. »
F.Kafka
Ce qui est compris
n’existe plus
sauf en tant que chose comprise
silence
Voilà ce que je pense
Car il s’agit de vivre dans le secret
bref silence
Eux ça leur échappe
ils croient
que ce qui est dit et annoncé et montré
se transforme en bien
pour eux
pour les autres
très bref silence
c’est comme ça
bref silence
Jon Fosse
Un adulte enfant se jette – ou presque – de la tour Eiffel et tombe dans les rues de New-York, comme un somnambule tombe d’un mur, il cherche la rencontre avec l’impossible, filmer un absent pour connaître les secrets de la création d’une œuvre. Faire la route jusqu’à Mabou, Nouvelle-Ecosse, où Robert Frank – c’est lui qu’on veut connaître – a construit une maison en bois près d’une mer gelée qui parfois se brise en morceaux emportés par le vent. Il habite là. Et cherchant comment se faire, le film se fait. On ne sait pas de quoi il est fait. D’amour, d’admiration, d’un long travail aussi. Le résultat, une œuvre transparente qui reste ouverte à l’indéfini en route vers l’irrejoignable.
Claude Régy